« Alors tu vas faire ton stage chez les fous ! ». Voilà littéralement ce qui est prononcé par l'entourage lorsqu'on explique que l'on va faire un stage en pavillon fermé. On a beau préciser que les personnes internées relèvent de pathologies différentes, que les termes de « psychotiques », « schizophrènes » sont plus appropriés pour les qualifier, rien n'y fait. On sent, dans des regards peu convaincus, que l'on peut bien les appeler « psychotiques » ou « schizophrènes » mais que pour la représentation commune ils sont et restent avant tout « des fous » (...)
[...] Mme E semblait ne pas avoir de réponse à sa propre question. Pourtant, en y regardant de plus prêt, ses interrogations concernant notre emploi du temps au sein de l'institution ont également rapport avec le rythme. Le rythme de nos allées/venues de notre présence/absence. On reproche souvent aux institutions psychiatriques de laisser les patients sans but, les activités proposées étant assez limitées. Or, chose surprenante, les patients ne s'en plaignent généralement pas Un rapport au temps différent Ceci est à mettre en rapport avec des sensations que nous avons éprouvées cette même première journée de stage au pavillon. [...]
[...] Plusieurs représentations de la folie 1.1 La représentation commune « Alors tu vas faire ton stage chez les fous ». Voilà littéralement ce qui est prononcé par l'entourage lorsqu'on explique que l'on va faire un stage en pavillon fermé. On a beau préciser que les personnes internées relèvent de pathologies différentes, que les termes de « psychotiques », « schizophrènes » sont plus appropriés pour les qualifier, rien n'y fait. On sent, dans des regards peu convaincus, que l'on peut bien les appeler « psychotiques » ou « schizophrènes » mais que pour la représentation commune ils sont et restent avant tout « des fous ». [...]
[...] La raison sociale est donc utilisée, les goûts, les passe- temps également pour tenter de circonscrire sommairement une personnalité dite « normale ». Qu'en est-il des personnes souffrant de pathologies mentales ? Certains travaillent ou ont travaillé, certains ont des passe- temps qui pourraient les définir. Et pourtant, on entendra le plus souvent à leur sujet : « Oh, tu sais, il ne va pas très bien il est complètement fou ». Et en disant cela que dit-on ? Presque rien. On renvoie l'interlocuteur à un vaste fourre-tout de représentations liées à la folie. [...]
[...] Assise en face de nous, elle ne participait pas à la conversation mais regardait fixement dans notre direction. L'imaginaire lié à la maladie mentale, elle semblait l'incarner pleinement : des cheveux en bataille autour d'un visage blême dont la bouche édentée hésitait entre le sourire et la grimace. Et ce regard Une phrase d'un roman de Léo Malet, lue à l'adolescence, nous a traversé l'esprit lorsque notre regard a croisé celui de cette patiente : « Un homme marchait sur le pont de Tolbiac, dans son regard, la folie ». [...]
[...] Une structure donnant un autre relief, une autre dimension à ces « petits riens » auxquels on ne prête généralement pas attention. Cette porte ouverte le premier matin de notre stage nous a donc permis d'entrevoir une autre dimension du rapport à soi, du rapport à l'autre Avoir ou non « la clé » Et cette porte nous en avions désormais la clé. Il s'agit ici des clés réelles. Et pourtant, dès le deuxième jour du stage, ce simple objet a été visiblement au centre d'un enjeu symbolique. Nous avions « la clé ». [...]
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